Ma spiritualité
18/05/2013
S'il est quelque chose de l'ordre de l'intime, c'est bien la "spiritualité" de chacun. Lorsque viennent les débats sur les religions, on me demande souvent "mais toi alors, tu ne crois en rien ?". Bien que je réponde "non", c'est une réponse incomplète si on considère les "non-dits" de cette question. Derrière cette question de croyance se pose souvent celle de la place de l'humain dans l'Univers, de sa création, de son destin. Lorsqu'on creuse un peu, l'adhésion à une religion est en général une réponse à une peur de vacuité de sa propre vie. L'humain imagine un ou plusieurs dieux, puissants, avec une volonté propre, qui nous imposent des épreuves que nous devrions relever pour accéder à une "vie éternelle", une fois que notre "âme" s'affranchira du carcan de notre corps et répondra de ses actes devant "l'Éternel".
Bien entendu, je ne crois pas à cela.
Et pourtant...
En tant qu'humain, je pense qu'il arrive forcément un moment où ces questions se posent, et elles ne nous quittent d'ailleurs jamais vraiment. Que fais-je ici ? Quelle est le but de ma vie ? Que restera-t-il de moi après ma mort ? Autant de questions angoissantes. Je me les suis posées, bien évidemment, et j'y ai répondu, à ma manière et sans besoin d'une quelconque force supérieure. Et puisque ce blog expose certaines parties de ma vie, je crois qu'il n'est pas absurde de partager ici cette vision du monde, de la vie, de l'existence et de son but. C'est une vision qui peut être effrayante par certains côtés, je n'en doute pas, mais elle est, à mon sens, extrêmement rassurante. C'est une vision forcément imprégnée de réalités scientifiques.
Nous sommes tous issus des étoiles. Chaque atome de l'Univers est "né" dans une étoile. Je suis le produit de milliards d'années de voyage d'atomes à travers l'Univers, et les atomes qui faisaient mon être à la naissance sont tous ailleurs actuellement.
Mon cerveau, aussi complexe soit-il, est le centre de réactions chimiques et électriques, une machine complexe fonctionnant uniquement à partir d'interactions simples. Ma conscience est le fruit de ces interactions, et un simple élément chimique de base, ou un simple courant électrique, peut en perturber ou arrêter le fonctionnement, comme une simple goutte d'eau peut arrêter le fonctionnement d'un ordinateur.
Et cette immense somme d'atomes qui interagissent pour former mon être permettent non seulement de contempler l'immensité de l'Univers et l'infiniment petit des atomes, mais aussi de les interroger en quête de réponses :
Est-ce que tout cela a un but ? Une volonté propre ? Un destin ?
Ce que je crois, c'est qu'il est théoriquement possible de prévoir les trajectoires, l'environnement et les interactions de tous les atomes de l'Univers à un instant t. Et sachant cela, il est théoriquement possible de prédire, à l'atome près, l'avenir. Je ne conçois pas les phénomènes physiques (et les phénomènes scientifiques en général) comme étant purement probabilistes. Les probabilités sont là pour combler un manque, celui de ne pouvoir accéder au modèle fonctionnel de l'Univers. Car connaître les caractéristiques de tous les atomes de l'Univers nous est physiquement impossible, ne serait-ce que parce qu'observer un atome influence celui-ci et qu'il faudrait donc connaître, au même instant de l'observation, les caractéristiques de la machine observant tous les atomes. Cette impossibilité rejoint, de manière amusante, l'idée de la phrase "les voies du Seigneur sont impénétrables".
Mais l'Univers a-t-il une volonté ? Ce serait prêter une conscience à l'Univers, ce qui me semble farfelu. Ce serait comme prêter à la Nature des notions de "Bien" et de "Mal", ce qui n'a aucun sens. Pas de volonté pour l'Univers donc, je l'imagine tel un bout de bois flottant sur l'océan : il poursuit son chemin, que nous ne pouvons qu'observer. L'Univers est une "puissance" très largement supérieure et il n'est rien que je puisse faire pour m'en attirer ses "bonnes grâces".
De toutes ces pensées découlent une sorte de fatalisme : l'Univers n'a pas de projets pour l'Humanité et celle-ci n'est rien à l'échelle galactique. On pourrait même y voir une raison d'abattement : à quoi bon ? Quel serait donc le sens de la vie ? Car si l'Univers n'a aucun plan pour l'Humanité, s'il n'est nul Dieu protecteur, cela veut dire que RIEN ne nous protège d'un désastre, de l'extinction de notre espèce, par exemple en raison de la collision d'un immense corps stellaire. Alors, à quoi bon ?
J'y vois pourtant une énorme opportunité. Nul salut dans les religions, nul salut venant d'une quelconque entité miséricordieuse, l'Humanité doit forger sa propre survie, en commençant par se multiplier au delà de sa planète originelle, dans un Univers sans aucune sorte de pitié. J'y vois l'occasion d'user de notre curiosité. C'est l'occasion de proclamer notre liberté, en tant qu'espèce, et de forger notre propre destinée plutôt que d'attendre un salut d'une entité soit-disant toute puissante qui ne viendra pas.
Quant à la mort et à l'éternité... Comme je l'ai dit, je ne suis qu'un agencement complexe d'atomes. Les atomes qui constituaient mon être à la naissance sont ailleurs. Dans les plantes, le béton, l'air, la terre, les océans ou même l'espace. Lorsque je mourrais, il en sera de même. Mais les atomes sont éternels, et "je" suis donc déjà éternel. Alors les promesses des religions et sectes concernant la "vie éternelle" qu'il faudrait "gagner" ont des airs de charlatans désireux de me vendre ce que j'ai déjà.
Au final, je suis un peu l'Univers se contemplant lui-même.
"Pale Blue Dot" : La Terre vue par la sonde Voyager 1 en 1990 à 6 milliards de kilomètres. Le petit point bleu là, c'est la Terre.
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La photo du point bleu pâle provient de Wikipedia.
6 commentaires
arnaudsm - 19/05/2013 à 15:43:52
une machine complexe fonctionnant uniquement à partir d'interactions simples
A mes yeux c'est la question la plus importante: Sommes-nous de simples animaux ? Nous avons pourtant une conscience individuelle de nous-mêmes qui est troublante.
C'est à mes yeux le signe que "l'âme" n'est peut-être pas si mathématique, et qu'elle a un destin différent de celui du corps.
La réponse à cette question viendra avec la simulation informatique du cerveau humain d'içi 10 ans, qui nous montrera si "l'âme" est physique ou non.
techmeout - 19/05/2013 à 17:52:09
A mon sens, l'âme est, comme "Dieu", un concept purement humain. Conscience est un mot plus approprié. Oui, un jour on parviendra à créer une conscience artificielle et l'interaction qu'elle aura avec les hommes sera quelque chose de passionnant.
csm - 19/05/2013 à 19:42:59
Ce que je crois, c'est qu'il est théoriquement possible de prévoir les trajectoires, l'environnement et les interactions de tous les atomes de l'Univers à un instant t.
C'est que vous n'avez rien compris à la science moderne ! Vous en êtes à la science cartésienne et mécanique du XIXe siècle. Entrez dans le monde de la thermodynamique, du principe d'incertitude, de l'incalculabilité, du comportement chaotique de certaines fonctions mathématiques, etc. Conseil : http://cosme.olympe.in/txt/loi.htm
Pazns - 21/05/2013 à 01:55:30
@arnaudsm :
Nous avons pourtant une conscience individuelle de nous-mêmes qui est troublante.
A-t-on réellement besoin d'un concept d'âme pour expliquer cela ?
Le cancre - 21/05/2013 à 09:11:07
@arnaudsm : La réponse courte : oui, nous sommes de "simples animaux". D'ailleurs, il serait bien pédant de penser que nous sommes au dessus des autres animaux alors qu'on est actuellement incapable de communiquer sur des sujets abstraits avec eux (alors que certains animaux sont capables de tels concepts). Et je crois avoir bien expliqué ma propre vision de "l'âme" dans cet article, pour moi ce qu'on appelle l'âme (et que techemeout appelle "conscience" fort à propos) n'est qu'un produit de réactions chimiques et électriques.
@techmeout : Oui ! J'ai hâte ! :D *sautille sur place*
@csm : Quelle fougue ! Quel commentaire péremptoire ! Et pour un scientifique, vous sautez à des conclusions bien trop hâtivement alors que vous avez tous les éléments sous les yeux, c'est dommage. Mes mots sont choisis avec soin, du moins j'essaye :p Je n'ai pas réfuté la physique quantique ou quoi que ce soit hein. Je dis juste que je ne crois pas que la physique, dans ce qu'elle est, soit probabiliste. Pour penser cela (et l'écrire sans vouloir le moins du monde "convertir" qui que ce soit), j'ai des connaissances scientifiques dans le domaine de la physique, mais aussi des connaissances historiques et notamment de l'histoire des sciences. Newton avait une très bonne théorie jusqu'à ce qu'on en apporte une plus précise, pour la faire courte. Vous soulignez, à juste titre, le principe d'incertitude, or ce principe n'est rien d'autre que ce que je décris dans mon article : cela permet de rendre compte des limites des mesures qu'on est capable de faire ; il ne s'agit donc pas d'une réalité physique au sens "essentiel" mais d'une réalité physique de l'expérience. Ce n'est pas à vous que je vais apprendre la notion de "contexte", et nous sommes tous soumis au même contexte ; cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas autre chose derrière, quelque chose de mécanique qui nous serait, physiquement, mécaniquement, inaccessible. Cela ne vient perturber en rien les notions et équations de la physique relativiste, de la thermodynamique, je ne les renie évidemment pas et cela n'en empêche évidemment pas ses applications.
@Pazns : Non, d'ailleurs la solution est dans la phrase elle-même : la conscience suffit. :)
probabilisme - 15/07/2013 à 15:04:13
Que la réalité soit vraiment aléatoire ou bien déterministe, les probabilités sont tout de même la meilleure description qu'on puisse faire des phénomènes de notre point de vue. Personnellement, je propose de construire une spiritualité en se basant sur les probabilités. Je développe cette pensée ici :
http://www.probabilism.net
La question en particulier du déterminisme pur sera l'objet d'un prochain article parlant de l'arbre des possibles. En substance, si le monde est déterministe mais que nous observons des probabilités de façon fondamentale, cela ne peut être résolu qu'en supposant une infinité d'univers parallèles avec toutes les variations possibles.
Cordialement.
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