Le cancre est là

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[Traduction] Emma Watson : L'égalité des genres est aussi notre problème

icon 22/09/2014


Ce texte est une traduction en français du discours d'Emma Watson devant les Nations Unies.
Ce texte est publié sous la licence CC by-sa 4.0.
Les traducteurs ayant gentiment participé à l'établissement de ce texte sont : pierrecastor, v45h (vash+feminism AT v45h DOT org), Riff, OranginaRouge, Koemgun, Httqm et votre serviteur.


Aujourd'hui, nous lançons une campagne appelée «HeForShe» [NdT : LuiPourElle en francais].

Je viens vers vous car j'ai besoin de votre aide. Nous voulons en finir avec les inégalités de genre, et pour cela nous avons besoin que tout le monde soit impliqué.

C'est la première campagne de ce type aux Nations Unies : nous voulons rassembler et encourager autant de garçons et d'hommes que possible pour être les défenseurs d'une égalité des genres. Et nous ne voulons pas nous contenter d'en parler, mais faire en sorte que cela soit réaliste.

J'ai été désignée à ce poste il y a six mois et plus je parlais du féminisme, plus je réalisais que le combat pour les droits des femmes était trop souvent devenu synonyme de «haine des hommes». S'il y a une chose dont je suis certaine, c'est que cela doit cesser.

Pour mémoire, le féminisme est par définition : « la conviction que hommes et femmes devraient avoir les mêmes droits et des opportunités égales. C'est une théorie politique, économique et sociale de l'égalité des sexes.»

J'ai commencé à m'interroger sur les questions de genre lorsqu'à huit ans je n'ai pas compris le fait d'être qualifiée de petit « caïd », parce que je voulais diriger les pièces de théâtre que l'on préparait pour nos parents, alors que les garçons ne l'étaient pas.

Lorsque j'avais quatorze ans, j'ai commencé à être sexualisée par des articles de presse.

À quinze ans, mes amies ont commencé à quitter leurs équipes de sport car elles ne voulaient pas être trop « musclées».

Quand j'ai eu dix-huit ans mes amis du sexe opposé étaient dans l'incapacité d'exprimer leurs sentiments.

J'ai décidé de devenir féministe et cela ne m'a pas semblé compliqué. Mais mes récentes recherches m'ont montré que le mot féminisme a une connotation négative.

Apparemment, je fais parti des femmes dont l'expression est perçue comme trop forte, trop agressive, isolante, contre les hommes et peu attrayante.

Pourquoi ce mot met-il tant mal à l'aise ?

Je viens d'Angleterre et je pense qu'il est juste qu'en tant que femme, je sois payée de la même façon que mes équivalents masculins. Je pense qu'il est juste que je puisse prendre des décisions à propos de mon propre corps. Je pense qu'il est juste que des femmes me représentent au sein des instances politiques de mon pays. Je pense qu'il est juste que l'on m'accorde socialement le même respect que celui attribué aux hommes. Mais malheureusement je dois dire qu'il n'y a aucun pays au monde où toutes les femmes peuvent s'attendre à recevoir ces droits.

Aucun pays dans le monde ne peut dire qu'il a atteint l'égalité des genres.

Ces droits, je les considère comme les droits humains, mais je suis parmi les plus chanceuses. J'ai une vie de privilégiée car mes parents ne m'ont pas moins aimée parce que j'étais une fille. Mon école ne m'a pas bridée parce que j'étais une fille. Mes mentors n'ont pas supposé que j'irai moins loin car potentiellement je donnerai la vie à un enfant un jour. Toutes ces personnes influentes ont été les ambassadeurs de l'égalité des genres qui ont fait ce que je suis aujourd'hui. Ils ne le savent peut-être pas, mais ce sont des féministes qui s'ignorent. Et nous avons besoin de plus de personnes comme eux. Et si vous haïssez toujours le mot, et bien ce mot n'est pas le plus important, ce qui est important c'est l'idée et l'ambition qu'il y a derrière. Parce que toutes les femmes n'ont pas eu la chance d'avoir les même droits que moi. En réalité, statistiquement, très peu ont eu cette chance.

En 1997, Hilary Clinton a prononcé un discours célèbre à Pékin à propos des droits des femmes. Malheureusement, beaucoup des changements qu'elle voulait apporter ne sont toujours pas effectifs aujourd'hui.

Mais ce qui pour moi ressortait le plus était que seulement un tiers de son audience était masculine. Comment pouvons-nous affecter les changements du monde si seulement la moitié de la population est invitée ou se sent bienvenue à participer à la conversation ?

Messieurs, je voudrais saisir cette opportunité pour étendre votre invitation. Les inégalités de genres sont aussi votre problème.

Parce que jusqu'à ce jour, j'ai vu le rôle de mon père en tant que parent être sous-évalué par la société bien que j'ai eu besoin de sa présence autant que de celle de ma mère.

J'ai vu de jeunes hommes souffrant de problèmes psychologiques incapables de demander de l'aide, par peur d'avoir l'air moins « macho». En réalité, au Royaume-Uni, le suicide est la première cause de mortalité des hommes entre 20 et 49 ans, et surpasse les accidents de la route, le cancer et les maladies cardiovasculaires. J'ai vu des hommes fragilisés et manquant de confiance par une vision distordue du succès masculin. Les hommes non plus ne bénéficient pas de l'égalité.

Nous ne parlons pas souvent des hommes emprisonnés par les stéréotypes de genres mais je peux voir qu'ils le sont et que quand ils en seront libres, les choses changeront pour les femme de façon naturelle.

Si les hommes n'ont pas besoin d'être agressifs pour être acceptés, les femmes ne se sentiront plus obligées d'être soumises. Si les hommes n'ont pas à contrôler, les femmes n'ont pas à être controlées.

Aussi bien les hommes que les femmes devraient se sentir libre d'êtres sensibles. Aussi bien les hommes que les femmes devraient se sentir libre de se sentir fort. Il est temps que nous percevions le genre comme un éventail et non comme deux ensembles d'idéaux opposés.

Si nous arrêtions de définir les autres par ce que nous ne sommes pas et que nous commencions par nous définir par ce que nous sommes ; nous pourrions tous être plus libres et c'est l'objectif de HeForShe. Cela concerne nos libertés.

Je veux que les hommes reprennent le flambeau. Que leurs filles, leurs sœurs et leurs mères puissent être libres de préjugés, mais aussi que leurs fils puissent avoir la permission d'être vulnérable et humains, et qu'ils revendiquent ces parts d'eux-même qu'ils ont abandonné, et qu'ainsi ils soient des versions plus honnêtes et plus complètes d'eux-même.

Vous devez penser : « qui est cette fille d'Harry Potter ? Et que fait-elle sur la scène des Nations Unies ? » Ce sont de bonnes questions, et croyez-moi, ces questions, je me les suis posées. Je ne sais pas si je suis bien qualifiée pour être ici. Tout ce que je sais, c'est que je me préoccupe de ce problème. Et je veux le résoudre.

Ayant vu ce que j'ai vu, et la chance m'étant donnée d'en parler, je pense que c'est mon devoir de dire quelque chose. L'homme polititique Edmund Burk a dit : « la seule chose qui permet au mal de triompher est l'inaction des hommes et des femmes de bien. »

Durant la préparation angoissante de mon discours et les moments de doutes, je me suis rappelé fermement : « Si je ne fais rien, qui le fera ? Si je ne le fais pas maintenant, quand cela se fera-t-il?» Si vous avez des incertitudes similaires lorsque des opportunités se présentent à vous, j'espère que ces mots vous seront utiles.

Car la réalité est telle que si nous n'agissons pas maintenant, cela prendra 75 ans — et je serais presque centenaire — avant d'espérer que les femmes soient payées l'équivalent des hommes à travail égal. En seize ans, 15,5 millions de filles vont être mariées dès leur enfance. À cette vitesse, ça ne sera pas avant 2086 que les femmes africaines rurales pourront aller au lycée.

Si vous croyez dans cette égalité, vous êtes peut-être l'un de ces féministes qui s'ignore dont j'ai parlé plus tôt.

Et pour cela je vous applaudis.

Nous luttons pour un monde uni, mais la bonne nouvelle est que nous avons un mouvement unificateur. Il s'appelle HeForShe.

Je vous invite à allez de l'avant, à vous faire entendre, à être cet homme pour cette femme. Et à vous poser cette question : « Si vous ne faîtes rien, qui le fera ? Si vous ne le faîtes pas maintenant, quand cela se fera-t-il ? »

Merci.

Ce texte est publié sous la licence CC by-sa 4.0 logo CC by-sa 4.0.

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1 commentaire

Anonyme - 27/09/2014 à 15:49:08

un discours excellent. Les hommes, aussi bien que les femmes doivent réagir. Ces inégalités nuisent aussi bien pour l'homme que pour la femme. Bravo pour ce discours.

N'ayez pas peur. Si vous vous dite "quelqu'un d'autre le fera" : alors tout le monde agira ainsi. Et la cause n'avancera pas. Il s'agit de nous. De nos vies. De notre descendance. Il suffit de se poser la question, de réfléchir la dessus. Il y'a pire comme condition, non ? Que de se poser un instant, et de se dire, "que puis-je faire pour le monde ?". Car ce mouvement, dans le but de rendre les femmes égaux aux hommes n'est en aucun dans le but de rabaisser les hommes comme beaucoup le pense ! Ce mouvement, lorsqu'il sera réellement modifié, ce ne sont pas que les femmes qui seront libres et heureuses. Il s'agira du monde entier.

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