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Aux journalistes qui font 1000 km en voiture électrique

Tue, 30 May 2023 18:58:54 +0200 - (source)

Visiblement il est à la mode de faire des longs trajets en EV pour ensuite conclure que c’est la galère.

Sauf que faire 500 km avec une Zoé, sans charge rapide j’appelle pas ça pertinent (non plus, car cet article débunke lui aussi le test décrit) ; faire 4 000 km en faisant des presque 30 arrêts, ou encore faire 1 000 km avec un SUV en roulant à 130, j’appelle pas ça pertinent non.

Après faut pas s’étonner que 70 % des gens trouvent les EV pas pertinents, quand bien même ils n’ont jamais utilisé de voiture électrique.

Ça ne m’empêche pas de revenir un peu ici, car je trouve ces tests débiles, et que je veux remettre un peu de vrai dans tout ça. Pas pour vous vendre des EV, mais pour remettre les pendules à l’heure avec des informations moins faussées.

Du choix du véhicule

Question : si vous devez transporter une botte de foin dans un pré, vous prenez quoi : un Ford Ranger, ou une Porsche 911 ?

Le Ford Ranger, qui est un gros pickup 4x4, on est d’accord.
Si vous prenez la Porsche 911, et que ça marche pas, vous dites quoi : que la Porsche c’est de la merde, ou que vous êtes juste un peu con ?

Bien.
Vous comprenez où je veux en venir.

Car autant avec une petite thermique (style Clio), on peut aussi facilement faire des distances que faire de la ville, autant, pour les EV, ce n’est pas aussi simple.
Les EV sont nettement moins versatiles.
C’est une de leurs limites. C’est assumé. Des gens travaillent dessus, mais pour l’instant, c’est comme ça.

Les EV ont un rayon d’action sur une seule charge qui est limitée. Certaines sont également limitées en vitesse de charge. Par conséquent, pour faire des distances, on ne prend pas ces voitures. Pas besoin de sortie de Saint-Cyr pour comprendre ça.

Je le redis : aujourd’hui, chaque EV est très adaptée à ce pourquoi elle est faite, mais très mauvaise pour faire tout le reste (avec le principe « qui peut le plus peut le moins » toutefois respecté).

Alors oui, on peut faire un tour de France en Twizzy (voiturette électrique). C’est possible, tout comme on peut le faire en poussette ou en rollers. Mais faut prendre son temps. Un chauffeur de taxi ou un commercial en vadrouille ne peut pas prendre son temps : le temps c’est de l’argent. Lui il lui fait une voiture avec de l’autonomie et dont le plein d’énergie ne prend pas trois heures.

C’est compliqué à comprendre ça ?

Donc la prochaine fois que vous voulez faire un article pour décrire l’expérience de faire des kilomètres en EV, prenez une Tesla Model 3 ou S. Prenez une Porsche Taycan, une Lucid Air, une Ioniq 6 ou tout autre berline taillée pour aller loin.

Ne prenez pas une citadine sans charge rapide, ni un SUV qui draine la batterie plus vite qu’un iPhone 4S en surchauffe.

Du choix de la conduite

Autre point, le style de conduite.
Car oui, la façon de piloter une machine influe sur la quantité d’énergie qu’elle consomme. Je vous l’apprends ?

Déjà, conduire un EV ce n’est pas juste rouler sur une grosse pile. C’est aussi tout un style de conduite à revoir. C’est comme passer d’une cuisinière à bois à une plaque à induction : les temps d’exécution ne sont pas exactement les mêmes.

Sur une thermique, on fait des économies de carburant en diminuant le régime moteur, en accélérant doucement, en passant les rapports de vitesse au plus tôt.
Sur un EV, fini tout ça : le régime moteur, on s’en fiche, et l’accélération n’est pas ce qui vous plombera le trajet.

En EV, ce n’est pas tant le fait d’accélérer qui va plomber votre conso, mais plutôt le fait de ne pas freiner qui va la maintenir. Quand on voit un STOP, inutile de maintenir son allure et de piler cinq mètres avant. Une EV a la possibilité de récupérer son énergie cinétique : il faut utiliser ça. Et ça, ça passe par un freinage doux et anticipé. C’est juste un exemple d’astuce.

Bien-sûr, sur autoroute, on roule sans freiner. Cette astuce ne compte donc que pour les trajets ville.
Sur autoroute, à quoi bon rouler à 130, si c’est pour perdre en recharge ce qu’on gagne en temps de conduite ? À rien ! Sauf si vous aimez attendre et faire des pauses.

Sur le test de Numérama, on parle d’une Nissan Ariya. Les données sont incomplètes sur EV-Database, mais ce Youtubeur allemand qui teste les EV à différentes vitesses obtient les consommations suivantes pour ce modèle :

Ces vitesses sont des vitesses typiques en Allemagne. On peut interpoler pour 110 et 130 en France :

Cela nous donne une idée.

Maintenant c’est quoi le but de tout trajet en voiture ? C’est parcourir des distances en un temps donné. Ainsi, pour un trajet de 500 km :

L’autre facteur à prendre en compte, c’est l’énergie consommée. Dans un EV, cette énergie se traduit ensuite en temps de recharge. Avec le même véhicule :

Maintenant, ce surplus d’énergie doit être remis dans la batterie. Vu que la Ariya a une puissance moyenne de charge de 110 kW dans de bonnes conditions, les 31,5 kW peuvent être remis dans la batterie en environ 20 minutes.

Autrement dit, en roulant à 110 km/h au lieu de 130 km, dans les conditions de cet exemple, on gagne 20 minutes de temps de charge, bien qu’on perde 33 minutes en conduisant.
Au final, le trajet n’est allongé que de 13 minutes, sur un total de 4 heures environ, soit 6 % de temps de plus, pour une économie d’énergie de 32 %).

Est-ce que ça vaut réellement le coup de rouler à 130 ? Sachant que ça fait s’arrêter plus longtemps, plus souvent, et de surcroît engorge les stations (et donc provoquer des files d’attentes en plus) ? Je vous laisse juger.

Par ailleurs, si le trajet est bien fait et bien planifié, la dernière charge d’un tel trajet peut généralement être omise si on peut se recharger une fois arrivé à destination (auquel cas le temps de charge n’est pas « perdu » car on fait d’autre chose entre-temps). Dans ces conditions, rouler moins vite peut effectivement faire gagner du temps.
Et ça c’est sans parler des temps annexes incompressibles : arrivée sur l’aire d’autoroute, branchement, lancement de la charge… qui sont d’autant de temps économisé si l’on réduit le nombre de charges.

Dans l’ensemble, je ne suis donc pas sûr que les 13 minutes de gagnées en roulant à 130 km/h soient réellement là. Au plus on gagnera 5-10 minutes.

De la courbe de charge

Dernier point très important (qui semble être respecté dans le test de Numérama, mais très peu par les autres journalistes et encore moins par les électromobilistes non-avertis) : la façon de charger.
Sur une batterie, que ce soit celle d’une voiture ou celle de votre téléphone, les derniers pourcents sont toujours beaucoup plus lents à compléter.

En gros : charger de 90 à 100 % prend autant de temps que de charger de 10 à 80 %. Sauf que dans le premier cas, on gagne 10 %, dans le second on gagne 70 %. Et donc autant en autonomie.

Ce qu’il faut donc faire, c’est privilégier la plage de 10 à 80 % pour se charger : c’est comme ça qu’on gagne le plus de kilomètres avec le moins de temps d’attente.

Et ici… chaque véhicule est un peu différent. Certains ont une charge la plus rapide entre 20 et 40 %, d’autres entre 30 et 60. Les meilleurs sont très rapides entre 10 et 70 %.

Par ailleurs, la puissance maximale de charge, en pic, n’est pas importante si ce pic n’est pas maintenu dans le temps. Charger à 250 kW durant 1 minutes, puis charger à 50 kW pendant 4 minutes, ça fait une puissance moyenne de 90 kW. Alors que charger à 150 kW durant 5 minutes, c’est nettement moins haut en pic, mais la puissance moyenne est de 150 kW, soit de moitié plus rapide !

D’ailleurs, toutes les bornes ne se valent pas : inutile de brancher une Dacia Spring sur un chargeur 350 kW au lieu d’un 150 kW. Vous n’y gagnerez rien. Par contre, le type avec sa Taycan, lui il y perd. Et pour peu que les chargeurs divisent les puissances de charges entre les bagnoles, vous y perdrez tous les deux en vitesse de charge ! Comme on ne prend pas du gazole sur une voiture essence, on évite de se mettre sur une borne inappropriée qui pourrait profiter à quelqu’un d’autre sans profiter à vous. Tout le monde y gagnera.

Mais pour ça, il faut connaître son véhicule. La plupart des gens s’en fichent et attendront le temps que leur véhicule leur dit de rester, et ils auront raison.

Mais quand on fait du journalisme spécialisé, il peut être bien de mentionner ces bonnes pratiques et ces astuces, et surtout que perdre du temps n’est pas une fatalité.

Conclusion

Pour conclure, c’est assez simple :

Pour commenter sur les articles de presse : je dirais — en tant que nerd du sujet justement — que ces articles me font bondir.
Certes, ils reflètent un usage « grand public non-éclairé », mais j’aurais aimé qu’ils éclairent ce grand public au lieu d’éteindre les quelques flammes qui s’allument lentement.

Je rejoins cependant quelques autres points évoqués dans l’article de Numérama :

Et malgré tout, faire un road-trip en EV est — oui — de plus en plus accessible, mais n’a toujours pas la facilité d’un road-trip en thermique. Inutile de le nier. Ça s’améliore énormément, mais on n’y est pas encore en 2023. Je maintiens toutefois que le souligner c’est bien, mais caricaturer l’ensemble en disant que c’est une galère pas possible, c’est mal.
Finissons toutefois par dire que si le road-trip vous fait peur, ça ne devrait pas gêner comme voiture « de tous les jours » et rechargée à la maison.


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