Parmi les mesures contestables et contestĂ©es de la loi « visant Ă sĂ©curiser et rĂ©guler l’espace numĂ©rique » (SREN), l’obligation des filtres anti-arnaques n’est pas la moindre. L’article 6 du projet de loi oblige les navigateurs web Ă bloquer les sites identifiĂ©s par les autoritĂ©s administratives (la police) comme Ă©tant des arnaques (phishing, mineurs de Bitcoin, usurpation d’identitĂ©, etc.).
Aujourd’hui dĂ©jĂ , la police peut exiger que les plateformes et les fournisseurs d’accès Ă Internet (FAI) censurent les contenus terroristes ou pĂ©docriminels. Dans ce cas, les FAI paramètrent leurs serveurs DNS, chargĂ©s de traduire les URL des sites (www.laquadrature.net) en adresses IP (185.34.33.4). Après cette modification, le site n’est plus trouvable Ă partir de son URL et se trouve donc hors d’atteinte pour la grande majoritĂ© des internautes. Sauf si.
Sauf si l’internaute sait choisir son DNS et contourner l’interdiction en passant par un autre serveur. Il est donc tout Ă fait possible, et pas très difficile Ă vrai dire, de contourner une censure par DNS. C’est un procĂ©dĂ© utilisĂ© lorsque certains États bloquent les DNS nationaux, comme cela s’est vu lors des rĂ©voltes du Printemps arabe en 2011 par exemple.
Mais la solution choisie dans le projet de loi pour les « arnaques » implique directement le navigateur web de l’internaute. Les navigateurs incluent dĂ©jĂ des listes de sites ou de pages web malhonnĂŞtes, sur lesquelles les utilisateurs pourraient croiser des virus ou des scripts malveillants. Si le navigateur dĂ©tecte une tentative de connexion Ă l’une de ces pages « dangereuses », il prĂ©vient l’internaute, qui a le choix de passer outre Ă ses risques et pĂ©rils. L’outil est donc envisagĂ© Ă l’heure actuelle comme un service que les navigateurs choisissent de rendre Ă l’utilisateur, qui garde la main sur la dĂ©cision finale.
Avec ce que le projet de loi SREN propose, les listes seraient non seulement tenues par la police, mais s’imposeraient surtout aux navigateurs. Une pratique très diffĂ©rente dans sa philosophie, et qui ouvre la porte Ă tous les excès possibles, Ă la censure de sites politiques par exemple, quand le fait sera installĂ© et qu’il suffira de l’Ă©tendre pour censurer Ă discrĂ©tion tous les sites « gĂŞnants ».
Plus de dĂ©tails dans notre article paru le 5 octobre dernier, avant le vote de l’article 6 Ă l’AssemblĂ©e ce mercredi 11 octobre.
Lire l’article : https://www.laquadrature.net/2023/10/05/projet-de-loi-sren-et-filtre-anti-arnaque-les-navigateurs-comme-auxiliaires-de-police/
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